« Nous devons considérer l’environnement spatial comme une ressource naturelle partagée et limitée » : cet appel de l’Agence spatiale européenne (ESA) n’est pas sans rappeler les enjeux environnementaux terrestres. Ce sont aujourd’hui près de 29 000 débris d’origine humaine de plus de 10 cm qui orbitent autour de la Terre. Un constat qui inquiète les scientifiques, tant pour des questions de sécurité que pour la préservation de l’environnement spatial. Si les solutions innovantes se multiplient, la question de la régulation et de la coordination internationale reste essentielle.

D’où viennent ces débris spatiaux ? « Depuis 1957, le début de l’ère spatiale, des tonnes de lanceurs, de véhicules et d’instruments ont été envoyés dans l’espace […] Leur nombre a continué à augmenter, et les explosions et les collisions dans l’espace ont créé des centaines de milliers d’éclats de débris dangereux », explique l’ESA.

Dans un récent point de situation, le bureau des débris spatiaux de l’ESA mettait en garde contre le syndrome de Kessler. Dans ce scénario, la densité des débris augmente le risque de collision avec les objets en orbite, générant ainsi exponentiellement de nouveaux débris susceptibles de provoquer de nouvelles collisions. Il deviendrait dès lors impossible de circuler autour de certaines orbites. Les risques de collision et l’endommagement de satellites pourraient également avoir un impact important sur plusieurs activités essentielles, telles que les télécommunications.

De récents événements viennent faire écho à ce scénario. En septembre dernier, la station internationale ISS a dû manœuvrer pour éviter des débris spatiaux. Sur Twitter, @JimBridenstine, administrateur de la Nasa, s’alarmait d’une situation qui s’était déjà présentée 2 fois dans le courant de l’année. Autre exemple récent, en octobre dernier, LeoLabs alertait d’un risque élevé de collision entre un morceau de fusée et un ancien satellite. Une collision finalement évitée.

De nombreux projets ont émergé pour répondre à cette problématique au cours des dernières années. L’ESA annonçait ainsi le 2 décembre dernier la signature d’un contrat de 86 millions avec la start-up Clearspace pour récupérer un morceau d’un ancien lanceur Vega, à l’aide d’un vaisseau composé de bras articulés et formant une sorte de pince géante. Le lancement de la mission est prévu pour 2025. Autre projet d’envergure : la création d’un satellite capable d’attirer magnétiquement les déchets, développé par la startup japonaise Astrocale. La startup a annoncé une première mission de démonstration pour mars 2021.

D’autres poussent la réflexion à plus longue échelle à l’image du collectif Gateway Earth Development Group qui présentait en août 2019 un projet de recyclage. Regroupant des universitaires du monde entier, le collectif a imaginé une installation en orbite terrestre au sein de laquelle les matériaux seraient collectés et recyclés pour la construction de futurs engins spatiaux. Un projet ambitieux, envisagé à l’horizon 2050.

Au-delà de ces projets, la question de la législation reste cruciale. Aux Etats-Unis, la Commission fédérale des communications adoptait en avril dernier de nouvelles règles pour les entreprises opérant des satellites en orbite terrestre. L’objectif annoncé par la FFC est bien de préserver l’environnement spatial. Dans un entretien à Lacroix.com, Pierre Omaly, expert en débris spatiaux au Centre national d’études spatiales (Cnes), appelle quant à lui à « une réglementation internationale sur les débris spatiaux » : « Il faut non seulement mettre à jour la loi française, mais surtout établir une réglementation internationale concernant ces objets sans propulsion ». Un effort collectif également souhaité par l’ESA qui met en avant des directives dans la conception et l'exploitation d'engins spatiaux pour une utilisation plus durable de l’espace, sur « la conception des lanceurs et véhicules spatiaux ».

Un enjeu qui s’avère d’autant plus important, à l’heure où le tourisme spatial connaît de formidables ambitions à long terme, avec une hausse sensible du trafic en perspective.

 

Observatoire Aérospatial, le 14 Décembre 2020

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