L’utilisation du paiement sans contact a connu une véritable envolée dans le contexte de crise sanitaire. Selon une étude de la Banque des règlements internationaux (BRI), sur l’ensemble des transactions par carte bancaire, la part du sans contact est passée de 30% en septembre 2019 à plus de 65 % début juin. Une hausse également significative pour les paiements mobiles, avec + 8% entre janvier et juin 2020 selon l’étude Opinion Way pour Orange L’afterbanking ou les nouveaux usages bancaires.
Plusieurs acteurs dominants du marché, souvent appelés les Big Tech, sont déjà bien implantés dans l'industrie du paiement mobile, tels qu'Apple et Samsung. Dans ce contexte, les spécialistes du marché s’inquiètent de leur position et stratégie, remettant en cause les principes de libre choix du consommateur, d’ouverture à la concurrence et de souveraineté numérique.
Le secteur bancaire se révèle particulièrement attractif, car cette industrie dispose d’informations personnelles sur ses clients : situation financière, patrimoine, état de santé dans le cadre d’assurances de prêts… Les données issues des transactions bancaires permettent aux opérateurs d’enrichir sensiblement leur connaissance client mais aussi d’établir des réseaux d’interactions entre individus et entreprises. Des informations précieuses pour améliorer le ciblage marketing et publicitaire.
En Europe, du côté des établissements bancaires et des acteurs du paiement instantané, la mise en œuvre du RGPD tend à protéger les informations personnelles. A l’inverse, les Big Tech externalisent toute ou une partie de cette conservation des données, vers des acteurs hors de l’Union Européenne ou étant soumis à des réglementations extraterritoriales. Ce positionnement soulève des inquiétudes en termes de souveraineté et de sécurisations des données.
En parallèle, les restrictions imposées par certains acteurs sur l’utilisation de leurs terminaux impactent directement les principes de libre choix du consommateur et d’ouverture à la concurrence. Par exemple, sur ses appareils, Apple restreint l’utilisation de son antenne NFC à des applications tiers, imposant ainsi l’utilisation de ses propres solutions de paiement. Cas similaire : Samsung réserve l’accès rapide à sa propre application. Des pratiques qui limitent le choix des consommateurs et rendent difficile l’émergence d’autres acteurs sur le marché.
De premières réponses apparaissent, d’un point de vue juridique. En Allemagne, une législation adoptée en début d’année impose aux acteurs dominants de permettre l’accès des solutions de paiement européennes à leur antenne NFC. En France, une proposition de loi adoptée au Sénat vise à assurer le libre choix des consommateurs dans le cyberspace.
La régulation est d’autant plus importante à l’heure où le paiement sans contact connaît un essor et participe aux gestes barrières dans ce contexte de crise sanitaire. La question dépasse d’ailleurs la problématique du paiement en ligne et freine les consommateurs dans des usages de tous les jours. Ainsi, les détenteurs d’IPhone n’ont à ce jour pas la possibilité d’utiliser leur pass Navigo via smartphone, Apple ayant refusé l’accès de son antenne NFC à la région Ile-de-France. Plus récemment, Apple n’a pas permis l’accès du gouvernement français au Bluetooth, pour le développement de son application StopCovid. Une décision qui s’inscrit dans le rapport de force entre les Big Tech et les gouvernements européens qui souhaitent renforcer leur souveraineté numérique. Pour les acteurs du digital, l’ouverture des terminaux mobiles représenterait ainsi l’opportunité de développer de nombreuses innovations d’usage et de services.
Observatoire Numérique en partenariat avec The Digital New Deal, le 25 Novembre 2020
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