L’information qualitative est de plus en plus difficile à dénicher, au point de transformer les plus motivés d’entre nous en véritables chercheurs d’or. Face à cela, pour les organisations, l’enjeu est d’aller plus loin en déployant leur propre fabrique de la connaissance, combinaison de la veille et du Knowledge Management, en y intégrant la dimension managériale et la culture d’entreprise.

La connaissance s'acquiert par l'expérience, le reste n'est qu’information”, assurait Albert Einstein. Pourtant, entre surinformation et désinformation, il devient de plus en plus difficile, pour chacun d’entre nous, de faire la part des choses entre bruit et contenus utiles pour nourrir l'expérience et la connaissance. L’information de qualité est devenue un produit de luxe. Pour toutes et tous il s’agit de se transformer en chercheur d’or pour repérer les paillettes ou les pépites informationnelles afin d'alimenter ses connaissances tout en exerçant son esprit critique. Une démarche individuelle à transposer, à l’échelle des organisations, en dynamique collaborative pour embrasser la complexité et renforcer la résilience.

Pour parvenir à adopter une pensée systémique, à savoir un ensemble de connaissances et de méthodes permettant de comprendre les phénomènes dans leur intégralité, les organisations ont en effet un rôle important à jouer. Qu’elles soient publiques ou privées, elles sont réunies par un objectif commun : celui de relever les défis du 21e siècle.

Comment ? En sensibilisant leurs collaborateurs et en mettant entre leurs mains les bons outils pour en faire de véritables orpailleurs de l’information et les accompagner, ensuite, à une tâche d’orfèvrerie. Dans son essai, “La 5e discipline”, Peter Senge décrit les prérequis pour créer les conditions favorables au sein d’une équipe à “l’apprenance”. Et, pour lui, la formation et le management jouent un rôle clé dans sa mise en place.

 

Identifier les parties prenantes et accompagner les chercheurs d’or

Pour déployer efficacement ce que nous appellerons ici une “fabrique de la connaissance”, il revient donc aux directions générales de donner l’impulsion et, pour ça, de mandater un pilote chargé de structurer un réseau de veille à partir d’un existant bien souvent informel, redondant et inefficient. Un coût caché qui se transforme rapidement en levier de performance.

Sur sa feuille de route, ce pilote aura comme mission de coordonner les aspects opérationnels et techniques (méthodologie, outils, etc.) d’une part et de vulgariser, animer et sensibiliser afin que tout le monde puisse se saisir de la démarche. A l’amorçage un premier périmètre d'action sera à définir. Notamment la désignation des parties prenantes : filiales, directions métiers et équipes projets. Si la perspective est bien, au final, d’embarquer tout le monde, cela ne peut pas toujours se faire du jour au lendemain. Tout dépend de la maturité de l’organisation en matière d'intelligence collective et de transversalité. Les chercheurs d’or identifiés pourront rapidement monter en compétence grâce à un programme de formation adapté.

 

Chercher les “pépites informationnelles”

Dans un deuxième temps, il s’agira d’identifier et de caractériser ce qui représente pour chaque partie prenante des “pépites informationnelles”. A savoir des informations porteuses de valeurs, éclairantes et, parfois, directement actionnables selon leurs enjeux et leurs centres d'intérêt. Il est essentiel de bien les définir et de les caractériser en cartographiant les informations à cibler pour, non seulement nourrir la capacité d’anticipation et d’innovation, mais aussi alimenter les plans d’actions et appuyer les décisions stratégiques.

On peut classer ces pépites en trois catégories : risques, opportunités et signaux faibles / tendances, elles-mêmes projetées en trois dimensions : le quotidien, le moyen terme et le long terme. Ces pépites informationnelles doivent être recherchées, tels les orpailleurs, parmi les paillettes d’or dans les alluvions aurifères de l’information et définies selon différentes échelles et différents prismes : un tronc commun vis à vis de l’organisation dans son ensemble, par filiale, par direction métier, par équipe projet, puis au niveau individuel.

A noter que, pour amorcer sa veille, s’appuyer sur des recherches historiques permettra de profiter d'un travail de synthèse déjà réalisé sur le centre d’intérêt (rapports, essais, enquêtes, documentaires, livres blancs, etc.) et de bénéficier de la mémoire collective, de la connaissance et de l'expérience de tiers. On parle ici de Deep News, dont la durée de vie, contrairement aux Fast News, s’inscrit sur le long terme. Elles sont généralement issues d’un travail d'investigation, en particulier s’il s’agit de relater des faits précis, de fournir des éléments de preuves ou de donner des clés de compréhension et d’action sur un sujet précis.

 

Une démarche humaine et collaborative avant tout

Contrairement à ce que peut laisser parfois entendre l’actualité en termes d’intelligence artificielle, une plateforme de veille n’est ni une boule de cristal ni une tâche que l’on doit entièrement déléguer à un robot. Au contraire. C’est un outil ! Un outil où l’IA joue un rôle d’assistant pour gagner en productivité sur un ensemble de tâches chronophages et sans valeur ajoutée.

La plateforme est également un vecteur essentiel dans la mise en réseau des collaborateurs, notamment pour favoriser une pensée systémique et s’abstraire de la pensée linéaire, seul moyen de prendre en compte l’environnement complexe dans lequel s’inscrivent les projets à mettre en œuvre et les problèmes à résoudre. La veille ne peut, en aucun cas, se substituer à l'expertise dont elle se nourrit et, surtout, à la créativité humaine qu’elle a vocation à stimuler. Son rôle est, au contraire, de délivrer des informations qui, une fois qualifiées et analysées, permettent la prise de décisions éclairées. Elle ne peut remplacer, ni le jugement, ni l'expérience d'une personne.

 

Le socle de l’entreprise apprenante

Enfin, la veille servira de source pour nourrir et entretenir une base de connaissance qui fera l’état de l’art des centres d'intérêt et qui pourra être complétée de retours d’expériences issus d’initiatives et d’actions entreprises par les équipes.Dans la continuité de la démarche de veille, et dans une logique d'information circulaire et durable, capitaliser la connaissance produite (Knowledge Management / Wiki) viendra parachever la fabrique de la connaissance. Cela permettra de développer des approches réflexives afin d’apprendre des situations de travail et des autres mais aussi d’instaurer un processus d’identification et d’analyse des problèmes pour se doter d’un système fiable de prise de décision.

Il ne faut jamais présupposer la solution et s’appuyer sur des faits et des connaissances à jour. Autant d’étapes importantes dans l’évolution vers une organisation apprenante en mesure de créer, développer et transférer du savoir, mais aussi, et surtout, de modifier ses comportements, ses process et son organisation pour s’adapter en conséquence.

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